UN DROIT FEODAL, LE DROIT DE QUINTAINE
De tous les droits seigneuriaux, le droit de quintaine est l’un des plus singuliers. Il concerne dans le Haut-Anjou les nouveaux mariés de l’année. Le jour choisi, ils doivent remettre au seigneur de l’argent pour payer les officiers et couvrir les frais de l’organisation, ainsi que divers produits : vin, pain, quartier de mouton. En règle générale, les jeunes épousées offrent au seigneur soit des fleurs ou une chanson, un baiser, des œufs, etc….Quant aux hommes, , en principe, montés sur un cheval, ils sont tenus de frapper avec une perche, la quintaine, écu en bois aux armes du seigneur, dressé sur un pieu.
La quintaine est un pal ou poteau qu’on mettait en terre et auquel on attachait un bouclier pour faire des exercices militaires à cheval, jeter des dards et rompre la lance.
Quintaine signifiait un droit seigneurial, par lequel le seigneur obligeait les jeunes gens à marier, à venir devant son château, tous les ans, rompre quelques lances ou perches pour lui servir de divertissement. Cet exercice se faisait tantôt à cheval, tantôt en bateau.
Après trois essais infructueux, ils sont soumis à amende.
Quand le seigneur est absent, c’est le sénéchal et le procureur fiscal qui se chargent de l’organisation et perçoivent droits et amendes. Un aveu du 13 septembre 1395 de Dame Jeanne d’USSE, dame de MONTJEAN de GENNES, de TOUAIRE et de GOUL, paroisse de MALLEVILLE, Evesché de NANTES, veuve de BRIANT IV de MONTJEAN, chevalier, seigneur de MONTJEAN SUR LOIRE, aux seigneurs de BEAUCAY, nous confirme ce droit de quintaine :
- Article 12 : j’ay les quintaines tant par eau que par terre, et d’y contraindre et d’y faire férir tous les nouveaux mariés de madite terre, et aussy chacune nouvelle mariée doit une chanson et un chapeau de roses, ou d’autres fleurs qu’elle doit avoir sur sa tête et ceux qui y font défaut de férir ladite quintaine, et aussi les femmes qui font défaut de dire ladite chanson et de rendre ledit chapeau, au jour accoutumé, et qui assigné leur est, j’ai droit d’en prendre et lever l’amende, telle comme elle appartient par la coutume du pays.
Source : AD 49 COTE 1 E 1214
Un registre, sous la cote 1 E 1227 possède plusieurs aveux de foy et hommage du seigneur François de CHERITE, père et fils, chevaliers, seigneurs de SOUS-LE-PUY, rendus à la baronnie de BEAUCAY, pour raison de la terre en haute justice de MONTJEAN de GENNES ; le droit de quintaine est bien mentionné :
- Le 15 mars 1610
- Le 12 février 1629
- Le 21 mars 1651
Le 26 février 1676, extrait d’un aveu rendu à la baronnie de BEAUCAY par Messire André de MAILLE de la TOUR LANDRY, seigneur de SOUS-LE-PUY précise ce droit de quintaine.
Un autre registre, sous la cote 1 E 1228, mentionne un aveu rendu à la baronnie de Saint-Cassien en Loudunois, le 3 novembre 1750, par Messire Charles POISSON, écuyer, pour raison de la terre et fief de SOUS-LE-PUY ; il cite le droit de faire tirer la quintaine tant sur eau que par terre.
Un procès-verbal datant de 1719, trouvé aux Archives départementales d’ANGERS, sous la cote 1 E 1228 et 1 E 1224 nous fournit d’intéressants renseignements quant au déroulement de cette quintaine . Ce procès-verbal est établi par Messieurs les officiers de la châtellenie de Sous-Le-Puy, qui constate que le seigneur de cette cour a droit de quintaine, tant sur terre que sur la rivière de Loire, et qu’elle a été fait tirer en l’isle des Buissons et sur ladite rivière, par les paroissiens de Saint-Eusèbe de GENNES et des ROZIERS.
C’est la représentation de l’ancien droit des seigneurs sur les mariées dans les temps de barbarie et aboli sous Saint-Louis.
Le droit de cuissage, ou droit de jambage, est un droit qui aurait permis à un seigneur d'avoir des relations sexuelles avec la femme d'un vassal ou d'un serf la première nuit de ses noces. Ce « droit » aurait été une déclinaison du droit de quittage, qui a réellement existé, qui obligeait un serf voulant marier sa fille en dehors du fief de son seigneur à payer au dit seigneur trois sous en échange de son autorisation symbolique du mariage.