L'assassinat de Jean sans Peur
Le 10 septembre 1419, le dauphin Charles, héritier du trône de France, et son grand-oncle le duc de Bourgogne s'étaient donnés rendez-vous en vue de se réconcilier. Le rendez-vous va déraper de façon plus ou moins malencontreuse pour le plus grand malheur du royaume.
Une guerre qui n'en finit pas
Le roi d'Angleterre Henri V est entré en guerre contre la France, quatre ans plus tôt. Il a écrasé la chevalerie française à Azincourt, a conquis Caen puis mis le siège devant Rouen. Rapprochant cette guerre de la précédente, menée par Édouard III, les historiens du XIXe siècle évoqueront une « guerre de Cent Ans ».
Henri V a tiré parti des sanglantes querelles entre Armagnacs et Bourguignons qui divisent le royaume de France. Mais le puissant duc de Bourgogne Jean sans Peur (48 ans), chef du parti bourguignon, et l'héritier du trône de France, le dauphin Charles (16 ans), chef du parti armagnac, semblent disposés à mettre fin à leur rivalité qui ruine la France et ne sert que les intérêts du roi d'Angleterre...
Une réconciliation avortée
Le duc et le dauphin se rencontrent une première fois le 8 juillet 1419 à Pouilly-le-Fort, puis à nouveau le 11 juillet. Le 19, un Te Deum célèbre à Paris leur prochaine réconciliation. Mais celle-ci est différée par une attaque des Anglais qui, progressant le long de la Seine, s'emparent de Poissy le 31 juillet et menacent Paris. Le duc de Bourgogne fait évacuer la famille royale sur Troyes, à l'Est.
Enfin, Jean et Charles conviennent de sceller leur alliance sur le pont qui traverse l'Yonne à Montereau, le 10 septembre 1419. Mais la volonté de réconciliation n'est que de façade. Les compagnons du dauphin gardent rancune au duc pour l'assassinat de Louis d'Orléans, douze ans auparavant. Il semblerait que le dauphin lui-même ait projeté la mort du duc de Bourgogne avec ses proches conseillers, Tanguy du Châtel et Jean Louvet.
Imprudent ou téméraire, Jean sans Peur se rend sans protection armée au rendez-vous du pont de Montereau. L'atmosphère est tendue. Le duc s'agenouille avec respect devant le Dauphin, qui feint l'indifférence. Se relevant, Jean cherche un appui en posant la main sur le pommeau de son épée.
Tanguy du Châtel n'attendait que ce prétexte pour porter un coup de hache au visage du duc en criant « Tuez, tuez ! ».
Par la porte du côté du dauphin, qui a été maintenue ouverte, des hommes en armes s'engouffrent dans l'enclos. Le duc est lardé de coups cependant que le dauphin, conduit à l'écart, reste impassible.
L'assassinat ravive la querelle des Armagnacs et des Bourguignons, au grand dam des Français loyalistes...